Inexécution par le locataire de son obligation / Indemnisation du bailleur
Cass. Civ. III : 3.12.03
Le locataire est tenu de répondre des pertes et des dégradations qui surviennent pendant la jouissance du logement. A défaut de respecter cette obligation, le bailleur peut le faire condamner à des dommages et intérêts.
Concernant le principe même de l'indemnisation, la Cour de cassation dans une précédente décision a affirmé que l'indemnisation du bailleur en raison de l'inexécution par le preneur des réparations locatives prévues au bail n'est pas subordonnée à la justification d'un préjudice.
Cette décision semble correspondre à un courant doctrinal récent pour lequel les dommages et intérêts ne sont qu'un mode d'exécution par équivalent du contrat. Ils résultent directement de l'inexécution contractuelle : la preuve de l'inexécution valant preuve du préjudice (Cass. Civ. III : 30.1.02 / cf. Dalloz 2002 n°29 Note Elhoueiss).
Il convient également de souligner les circonstances particulières de cette espèce : après restitution des lieux, le bailleur avait vendu le bien, non entretenu par le locataire, à un promoteur qui l'avait fait démolir. La chose ayant été détruite, il était difficile de rapporter la preuve d'un préjudice.
La décision récente de la Cour de cassation (Cass. Civ. III : 3.12.03) semble cette fois plus conforme au principe classique de la responsabilité civile contractuelle : les dommages et intérêts ne sont alloués au bailleur qu'en présence d'une faute contractuelle du locataire résultant de l'inexécution d'un contrat, et d'un préjudice démontré par le bailleur et lié à la faute de son cocontractant.
En l'espèce le locataire restitue des locaux dans un état lamentable, mais le nouveau locataire souhaitant y exercer une activité totalement différente de la précédente (salon de coiffure), réalise un aménagement spécifique et complet.
Constatant que le bailleur ne prétendait, ni avoir réalisé les travaux, ni avoir contribué à l'aménagement du nouveau preneur, ni avoir dû consentir un bail à des conditions plus défavorables que si l'état des lieux avait été différent, la Cour de cassation en a donc déduit, qu'en l'absence d'un préjudice né de la faute contractuelle, la demande en dommages et intérêts devait être rejetée.
Une fois affirmé le principe - pas d'indemnisation sans preuve d'un préjudice - il convient de s'interroger sur ses conséquences. Remet-il ou non en cause les précédentes solutions apportées par la Cour de cassation sur les conditions de l'indemnisation ?
Pour mémoire : l'indemnisation n'est pas subordonnée à l'exécution des travaux (Cass. Civ. III : 30.1.02). Le bailleur n'est nullement tenu à fournir les factures de travaux acquittées par lui (Cass. Civ. III : 3.4.01), la production de simples devis suffit.
Comment le bailleur apportera-t-il la preuve d'un préjudice s'il n'envisage pas l'exécution des travaux, et si le logement est reloué aux conditions du marché ?
Dans un sens différent cf. Cass. Civ. III 30.1.02